L'Equitation Pédagogique

pédagogieOctobre 2025

La peur : son labyrinthe

La peur avec le cheval et les peurs du cheval sont des sujets qui touchent tous ceux qui vivent avec les chevaux, cavaliers, meneurs, soigneurs… Pour autant, c'est un sujet assez peu abordé.

Les différentes étapes, si c’était une courbe à suivre

PhaseDescriptionExemples
1. Peur : Choc / SidérationLa peur surgit brusquement, fige le corps et l’esprit.Réaction primitive (cerveau reptilien) : immobilisation, protection, anxiété, hypervigilance…
2. DéniRefuser de voir l’évidence
Empêcher la peur d’envahir la conscience.
“Non, ça n’arrive pas / je n’ai pas peur.”
Pas de problème = pas de solution= Danger
3. RépressionS’empêcher de penser à ses problèmes pour éviter la souffrance immédiateRefouler sa peur, la reléguer à l’inconscient
Culpabiliser ou avoir honte
4. Imitation / ConformismeCopier des comportements rassurants.Enrêner un cheval pour le maitriser.
Se mettre en colère contre le cheval
5. RationalisationDissimuler ses émotions derrière des mensonges (à soi et aux autres)“Ce n’est pas grave, c’est logique, j’ai une bonne raison.”
Négociations intérieures.
Croyances dangereuses (porte-bonheur)
Danger.
6. Évitement / ProcrastinationEviter les situations redoutées, anxiogènes, ou potentiellement dangereusesFaire une pause concernant une activité.
Momentanément, le temps de trouver une solution
7. AltruismeEviter le conflit et déplacer la peurEcouter et satisfaire le besoin des autres
8. SublimationTransformer les impulsions inadaptées en comportements utilesAccepter son émotion et lâcher prise.
Au lieu de tirer sur les rênes, rassurer en parlant, chantant, caressant.
9. AnticipationRecenser les scenarii possibles
Eviter le stress d’une situation nouvelle
Prévoir les risques,
Préparer une réponse adaptée et consciente.
10. HumourSe libérer émotionnellement.
Intégrer ses émotions
Souligner les aspects amusants ou ironiques par rapport à soi-même,
tout de suite, sans attendre de le raconter.

peur
©Laurence Grard-Guenard

Les termes décrivent la progression des défenses psychiques que l’on met en place face à la peur — du plus inconscient (déni, répression) au plus conscient et mature (anticipation, humour).
L’évitement – La procrastination : C'est la zone de blocage. Cette étape se situe entre le besoin d’éviter pour ne pas souffrir, et le besoin d’avancer pour retrouver la maîtrise.
Mais voilà : La peur ne se vit pas comme une courbe de façon linéaire. On peut revenir en arrière (ex. retomber dans l’évitement) ou sauter des étapes selon le contexte et la maturité émotionnelle.

peur
©Laurence Grard-Guenard

J’ai donc préféré l’image du labyrinthe pour représenter le cheminement de la peur.

La peur : son labyrinte

Le labyrinthe est à la fois symboliquement fort, facile à visualiser, et très cohérent avec l’idée que la peur n’est pas un ennemi à vaincre, mais un espace à explorer.

peur
©Laurence Grard-Guenard

Dès que la personne trouve une issue d’action ou de sens (même petite), elle commence à sortir du labyrinthe : elle transforme la peur en énergie utile (altruisme, sublimation) ; puis en stratégie consciente (anticipation) ; jusqu’à pouvoir en rire ou la relativiser (humour).

Comment appréhender le labyrinthe de la peur

  1. L’entrée du labyrinthe : le choc. « Quelque chose m’effraie, je ne comprends pas, je perds mes repères. » C’est le moment de sidération, l’entrée brutale dans l’émotion
  2. Les premiers couloirs : les défenses immédiates. Déni : j’ignore la peur. Répression : je la cache, je la refoule. Ces couloirs mènent souvent à des impasses, pour illustrer que ces mécanismes protègent temporairement mais ne font pas avancer.
  3. Les détours d’adaptation : les stratégies sociales. Imitation : se conformer à un modèle rassurant. Rationalisation : expliquer, intellectualiser, maîtriser mentalement. Ces chemins mènent vers la sortie, mais toujours par des détours : on croit avoir compris, mais la peur n’est pas encore intégrée.
  4. La boucle : l’évitement / l’altruisme. “Je ne peux plus avancer.” C’est le cœur de la peur, le moment de blocage total, où tout semble tourner en rond. C’est aussi le point d’inflexion : c’est là que commence la transformation possible.
  5. Le chemin de la sortie : les transformations. “Et si cette peur avait quelque chose à m’apprendre ?” Altruisme : tourner la peur en aide ou en action vers les autres. Sublimation : l’utiliser comme moteur créatif ou sens profond. Anticipation : prévoir, préparer sans paniquer. Humour : relativiser, sourire de soi, respirer. Ce chemin vers la sortie est plus fluide, plus lumineux, orienté vers la libération.
  6. La sortie : la sérénité. “Je reconnais ma peur, je la comprends, elle ne me domine plus.” C’est le moment où la peur devient une alliée, un signal d’attention, non une ennemie.
Je me suis efforcée, dans mon dernier ouvrage « Je fais confiance à mon cheval », de décrire une méthode simple où la rigueur et l’exigence sont les conditions importantes de réussite : il ne s’agit pas de ne plus avoir peur, mais de savoir quoi faire quand elle survient.

Les inspirations pour construire ces étapes

Je me suis appuyée sur plusieurs modèles issus de la psychologie du deuil et de l’étude des réactions à la peur, comme le Defense Cascade Model (Lang, Davis, Öhman), ou la fameuse courbe du deuil d’Elisabeth Kübler-Ross.”
Le "Defense Cascade Model" (Lang, Davis, Öhman) : les 6 F : Freeze, Flight, Fight, Fright, Flag, Faint (Froid, Fuite, Combat, Effroi, Drapeau, Evanouissement)
peur
La courbe du deuil est un concept développé par la psychiatre Elisabeth Kübler-Ross
peur

Les fondamentaux de l'attelage Les fondamentaux du travail aux longues rênes galops 1 à 4 et 5 à 7 Je fais confiance à mon cheval
© LGG

Toute utilisation de textes des sites attelagepeda et equipeda, sans autorisation écrite précisant les droits de reproduction, est formellement interdite, sous peine de poursuites.

Lire aussi :
La peur de l'enseignant
Maman, mon poney a peur
Conférence sur la peur à cheval