L'Equitation Pédagogique

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La locomotion perturbée du cheval

Tout cavalier doit se préoccuper des effets que produit sa façon de monter à cheval. Respecter un cheval, c'est aussi savoir comment le monter correctement, même s'il s'agit d'un cheval de loisir !

Le poids du cavalier

Un jeune cheval ne sait pas encore porter le cavalier. Il réagit à la pression exercée par le poids du cavalier, en contractant les muscles de la ligne du dessus. Le dos et l'encolure sont alors concaves : le dos est creux et l'encolure renversée.

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La ligne du dessus est concave, le dos est creux, l'encolure renversée, les postérieurs ne peuvent s'engager sous la masse.

Dans ces conditions, soit le cheval n'avance pas ou peu, soit il précipite. Ces deux façons de se mouvoir ne sont pas franchement confortables pour le cheval. Celui qui n'avance pas contracte tellement son dos qu'il risque l'acculement et la rétivité. Celui qui précipite fuit et devient incontrôlable avec un fort déséquilibre sur les épaules.
Dans ces cas, si le cavalier a le reflexe de tirer avec ses mains, il empire gravement la situation et peut même jusqu'à faire paniquer sa monture : sauts de monton, cabrers, fuite désordonnée en s'emmêlant les jambes, chute du cheval par retournement ou fauchement...
Même sans aller jusqu'à ces extrêmes, le cavalier doit prendre conscience, que dans cette attitude, le cheval souffre assurément.

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Dessin de gauche : le cavalier tire pour freiner son cheval
Dessin de droite : le cavalier abaisse fortement ses mains en conservant la tension
Dans les deux cas, le dos du cheval se creuse et la situation empire.

La situation empire : Pourquoi ?

Le cheval ne peut pas fléchir sa nuque car il est en opposition à la traction exercée sur sa bouche au niveau des barres. Ses muscles sont donc en train de travailler contre la main (muscles de l'encolure inférieure)en repoussant la tête vers l'avant. Le seul recul qu'il est possible d'effectuer est celui de la colonne vertébrale (segment cervical).

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Attention, les cervicales ne suivent pas la courbe de l'encolure.
Les muscles en bleu repoussent l'action de la main, qu'elle soit vers l'arrière ou vers le bas (flèches marrons). Le seul recul possible est celui de la colonne vertébrale qui passe de la position verte à la position rouge.

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©LGG

Les enrênements, fausse solution

La mauvaise utilisation d'enrênements, en forçant la tête à descendre, renforce la musculature inférieure de l'encolure qu'on a vu en bleu dans le dessin précédent : en effet, le cheval s'oppose à la pression que l'enrênement exerce vers le bas. Il tire vers le haut, vainement car il ne pourra se dégager, mais pendant toute cette résistance, ses muscles, eux, se développent.

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Les ligaments supérieurs sont étirés à l'extrême, cela occasionne des lésions. Les muscles inférieurs de l'encolure se renforcent au détriment de la musculature supérieure, malgré l'orientation.

Dès que l'enrênement sera oté d'un cheval travaillé en force vers le bas, sa tête, que plus rien ne retiendra, repartira vers le haut. La musculature supérieure, en rien musclée, retrouvera immanquablement son orientation concave. Les enrênements mal employés n'aident nullement à faire une ligne du dessus dans le bon sens, quoique puisse laisser penser l'attitude du cheval enrênné !

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Le travail en force sur des enrênements ne permet pas d'éduquer le cheval. Sitôt otés, le cheval retrouvera son attitude concave, avec une musculature à l'envers fortifiée.

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Le mauvais réglage des enrênements, malgré les notices et les explications, créent de graves lésions.

Ainsi il n'est pas rare de voir, parmi les vieux chevaux de club à la retraite, des dos fortement ensellés malgré les précautions (mal) prises pour les orienter. Il est également possible de reconnaitre les chevaux mal montés à l'ensellement que leurs dos présentent (souvent à cause de transitions toujours demandées avec des mains qui tirent).

La main et le dos

La façon de monter d'un cavalier influence la santé et la longévité d'un cheval. Comme nous l'avons vu plus haut, avec un cheval doté d'une orientation défectueuse, que ce soit un jeune cheval ou un cheval ayant connu des enrênements trop contraignants, l'action des mains ne fait qu'empirer la situation. Remettre des enrênements peut constituer une aide (momentanée), à condition qu'ils soient bien réglés cette fois-ci. N'hésitez pas à consulter les articles sur le gogue et les rênes allemandes de la rubrique Galop 7.

Le cheval concave : solution

Ce cas n'est pas le plus simple à gérer, et un rond de longe connu par le cheval peut s'avérer une aide précieuse. Si vous ne pouvez en bénéficiez, il vous faudra travailler sur des cercles, en orientant discrètement l'encolure, non pas vers le bas, mais sur le tracé du cercle. Les adeptes du "deux doigts sur les rênes" seront ravis, et ceux qui ont la main dure et ne peuvent s'empêcher de se cramponner devront être écartés du redressage du cheval concerné.
Un cavalier confirmé et léger sera l'idéal car il faudra commencer par épargner le dos au maximum. En utilisant au maximum les positions en équilibres deux points et les mains posées toujours au même endroit, il faudra apprendre au cheval à réagir au leger déplacement du poids du corps (redressement du cavalier) et au serrement discontinu des doigts sur les rênes juste au contact. La légère pression des doigts sur les renes doit pouvoir se transmettre à la bouche.
L'équilibre du cavalier doit être excellent, car il lui faudra peut-être lâcher entièrement les deux rênes pour reprendre à zéro un contact moelleux, et cela sans changer l'allure à laquelle il est. Le cheval doit comprendre le cavalier et non pas se faire retourner le dos, et ça peut prendre du temps. Il faut donc s'armer de patience. La voix et la caresse sont des outils incontestables dans cette rééducation.
Une série d'assouplissements visant à faire engager les postérieurs (au pas pour commencer) doit être envisagée en parallèle. Peu à peu le cheval va trouver un fonctionnement juste, muscler son dos dans le bon sens, et le cavalier pourra progressivement passer à un équilibre assis.

Actions de main erronées

Tout ce qui se passe dans le dos du cheval se répercute sur son encolure et inversement.
Voici un cheval bien conformé avec un dos convexe (en noir). Si l'arrêt se fait sur fermeture des doigts, la main restant en place, le cheval s'arrête en conservant son attitude (en noir). Pour demander un relèvement d'encolure lors de l'arrêt (bleu), il suffit alors de solliciter les postérieurs avec les jambes (bleu) dans l'idée de faire s'asseoir le cheval : si le cheval engage ses postérieurs dans l'arrêt, son avant-main va se redresser. Les mains ne bougent pas, ce sont uniquement les doigts qui travaillent (se ferment). Progressivement, avec un cavalier patient, le cheval passera d'une attitude convexe horizontale (noire) à une attitude convexe légèrement redressée (bleue). Plus tard, et sur cette attitude, le cavalier pourra travailler la cession de machoire et de nuque.

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Attitude correcte quand la main reste en place (noire et bleue). Attitude incorrecte quand la main tire (recule), en rouge.

Si l'arrêt est demandé avec trop de main, c'est à dire en tirant sur les rênes, soit avec les deux mains ensembles, soit en faisant droite / gauche pour obtenir un placer artificiel, le cheval n'a d'autres solutions que de :

Bien souvent, l'arrêt est difficile à obtenir. Le cavalier continue de tirer car il ne se rend pas compte qu'il met lui-même le cheval dans l'incapacité de répondre à sa demande : le cavalier veut s'arrêter, tire, met le cheval en déséquilibre sur les épaules, le cheval pèse alors sur l'avant-main et devient alors incapable de s'arrêter. Il continue de marcher au ralenti et en pesant au lieu de s'arrêter.
Ce même problème se retrouve chez le cheval qui trottine au pas, galope la tête basse, devient insensible à l'action des jambes ...

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Lors de la locomotion, le cheval encapuchonné a le rein figé. Sa ligne du dessous est surcontractée. Sa ligne du dessus est en sur-extension. Les postérieurs s'éloignent et ne s'engagent plus. Le cheval peut trébucher, ses épaules étant coincées et portant tout le poids. Le cheval ne peut plus répondre aux demandes de son cavalier.

Autre réponse du cheval

Il s'agit du faux placé. Le cavalier "met en main" son cheval dans une attitude haute. Il n'a sollicité que la bouche avec ses mains et non les postérieurs et le dos avec ses jambes. Cela donne une attitude artificielle, obtenue par la force des bras, et absolument néfaste pour le dos du cheval.

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L'encolure est ronde, mais le dos est creux et les postérieurs désengagés. Dans cette "mise en main" en force, le cheval s'habitue progressivement à avoir une avant-main portée, il s'appuie sur le mors, et devient de plus en plus lourd.

Le cheval plaqué finit par se laisser porter et devient lourd à la main. Son dos, creusé, n'est pas en mesure de porter le cavalier. Son arrière main est éloignée et le port de queue est souvent crispé, accompagné de fouaillements plus ou moins violents. A longue échéance, une telle utilisation rend le cheval complètement rétif.

Pour la santé des chevaux et pour leur longévité, ne soyez ni préssés ni trop ignorants. Vous n'êtes pas obligés de faire de la haute école ou des compétitions nationales, mais vous pouvez respecter la nature de votre monture, même si c'est un cheval de loisir ou de promenade.

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Lire aussi :
Permettre au dos de travailler dans le bon sens
Le gogue
les renes allemandes
l'équilibre 2 points (l'assiette 2)

Bibliographie :