L'Equitation Pédagogique

cheval
©Laurence Grard Guenard

     Enseignant, métier formidable et dangereux    pédagogie



Sujet crucial et pourtant banal, la relation élève/enseignant dans le domaine équestre a été abordée dans d'autres articles sur ce site (voir bas de page). D'une façon idéale, la relation à trois, cavalier-cheval-enseignant, est sous la dépendance de l'enseignant, c'est dire le poids qu'il porte sur ses épaules ! Dans la réalité, la mauvaise foi, consciente ou inconsciente, des élèves peut interférer et nuir gravement à cette relation / communication.

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On ne peut mentir au cheval: l'élève doit être vrai avec son cheval, il n'est pas là pour faire le clown, jouer au mariol ou essayer de duper son cheval comme il pourrait le faire vis à vis d'éventuels spectateurs ou dans la vie de tous les jours avec son entourage. Le cheval ne triche pas. Il se fiche que le cavalier soit beau, gros, vieux. Il est ici et maintenant, avec son cavalier. L'enseignant n'est pas non plus là pour tricher. Il est même 
capable de déceler cette malhonnêteté dans le comportement du cavalier, et oui, c'est son métier, et il sait faire particulièrement attention aux personnalités douteuses et nocives. Le rôle de l'enseignant, homme de cheval, est de permettre le dialogue entre le cavalier et le cheval. Il s'inscrit dans l'ici et le maintenant, dans une relation vraie. Même à pied, il est capable de sentir et ressentir le cheval que l'élève monte et les moindres signaux que celui-ci émet. L'élève doit faire la démarche similaire : être ici et maintenant, dans le vrai, et non dans le paraitre, ni dans l'impatience du futur. Si la tentation est grande de brûler les étapes, elle n'engendrera que frustration car il n'y a qu'une impasse au bout de ce comportement. Si l'élève n'est pas dans le vrai, il triche et bloque lui-même sa progression. Certains élèves détestent ainsi d'excellents enseignants clairvoyants qui voient juste en eux. Malhuereusement, ce sont ceux-là même qui peuvent les aider à se dépasser, à dépasser ce blocage.

Faire progresser ses élèves: Si l'enseignant prend du temps sur sa vie pour enseigner, c'est pour obtenir le meilleur résultat possible chez chaque "couple". L'enseignant y croit, il est persuadé qu'il va y arriver (à faire comprendre au cavalier comment communiuquer avec sa monture), que le cavalier peut y arriver (à communiuqer avec sa monture). L'enseignant a la foi ! Si l'élève doute, l'enseignant est capable de trouver une solution pour débloquer la situation. L'élève doit y croire aussi et faire confiance à son enseignant, enseignant qu'il doit faire la démarcher de choisir et non pas prendre le premier venu. Si certains élèves pensent que leur enseignant ne croit plus en eux, alors qu'ils vérifient qu'effectivement, le moniteur a cessé de leur enseigner, car transmettre est un acte qui prend énormément d'énergie (moniteurs qui regardnt leurs pieds, moniteurs qui répètent "voilà... c'est bien ... oui ...." sans consignes et sans corrections...) Toutefois, tout élève a la capacité d'user un enseignant, s'il triche avec lui-même donc avec les autres. Dans ce cas, l'enseignant ne peut plus s'impliquer et finalement c'est bien l'élève qui ne progresse plus car l'enseignant ne peut plus proposer de solutions...

laurence  enseignant

Ceux qui cherchent la petite bête: ils sont très nombreux ! Parfois noyés dans la masse d'une reprise, et encore, ils sont capables de la "pourrir", ils se dévoilent toujours en cours particulier. Leur énergie négative prend le dessus et peut se manifester de différentes façons :
- "Oui, mais ... "
- "Moi, ceci..." "Moi, cela..." "Je suis trop vieux..." "Je n'y arriverais jamais...", "Je ne suis pas prêt...",
- "Mon cheval est trop chaud...",
"Il n'est pas en équilibre...",
- "C'est pas la bonne foulée...",
- " J'avais le soleil en face...",
- "Mon cheval a glissé...",
- "Le maréchal vient de passer...", le chef de piste, le moniteur ...
- les excuses, les manoeuvres pour éviter de se mettre face à soi-même (voltes interminables)... 
Ce processus est auto-destructeur, et engendre la spirale de l'échec ! Ces cavaliers font de la résistance dans leur tête et bloquent leur corps. Ils trichent avec eux-mêmes.
De même, ceux qui entrent dans le système "le client est roi" ne supportent pas la remise en question, rejettent toutes les propositions, accusent le cheval ou l'enseignant parce qu'il est trop difficile de casser leur propre "égo" et de regarder vraiment ce qui ne va pas chez eux. Ceux qui pensent que leur statut est celui du client ne comprennent pas qu'ils doivent faire des efforts pour obtenir des résultats.

laurence

L'humilité : L'élève doit faire face à ses blocages. L'enseignant n'est pas un juge, il n'est pas là pour dénigrer, juger, critiquer : on est comme on est. L'enseignant est une aide, il apporte des solutions et propose des exercices. Par contre, il n'est pas psychothérapeute et tout le monde doit y mettre du sien. Accepter la réalité, c'est faire la différence entre la technique et l'émotionnel : cela simplifie la résolution des problèmes. L'élève doit rester ouvert à lui-même, à ses sensations, au cheval, aux solutions proposées pour aborder le travail avec sérénité et surtout avec la possibilité de comprendre et progresser. Il doit faire confiance, se mettre entièrement dans les mains de celui qui enseigne et qui est là pour l'aider. L'enseignant n'est qu'un intermédiaire entre le cheval et le cavalier.

L'écoute, l'humilité, la notion d'effort, sont souvent ignorés. Il n'y a pas d'apprentissage ni de progression sans un minimum de contrainte, sans un enseignement rigoureux et discipliné. On ne dépasse pas le stade de la gentille initiation sans régularité et efforts dans la durée. Les cavaliers n'ont que très rarement une analyse pertinente de leur niveau réel et, de ce fait, acceptent mal les conseils. Pourtant les progrès sont rapides dès lors que chacun est honnête vis à vis de soi même, et donc des autres : rechercher les personnes qui encouragent au lieu de critiquer, être ouverts aux conseils, être souple dans sa tête... L'équitation demande une véritable implication, de retour sur soi-même, elle aide celui qui est prêt à recevoir ses enseignements, à se réveler à lui-même, à prendre conscience de l"ici et le maintenant", à accepter ses émotions,  et à apprendre à se détacher de sa conditon.

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Ici et maintenant : le véritable cavalier vit dans le présent absolu, il ajuste en permanence sa conduite dans l'instant, en fonction des informations incessantes qu'il reçoit du cheval. Pendant que l'enseignant l'aide à ressentir, à ajuster ses demandes, il est capable de rester concentré à son prolongement : le cheval. La communication entre l'enseignant et le cavalier doit parfois alors être la plus dépouillée possible, immédiate, sans détour, un mot, un silence pour permettre au cavalier de se recentrer, pas de "s'il te plait", de "merci", de "blabla" parasites, juste l'essentiel pour laisser l'élève tout entier à ce qu'il est en train de faire et de vivre : aucune pensée inutile et nuisible. Les messages doivent être perçus pour ce qu'ils sont et non pas interprétés. L'enseignant est ici et maintenant, dans le vrai, avec un cheval qui est dans le même monde. Il est, parfois même, à travers l'élève, en train de vivre réellement ce que le cavalier vit.

L'enseignant doit être parfait. Si le cheval a le droit de ne pas être à l'écoute, si le cavalier a le droit d'avoir des états d'âmes, l'enseignant, lui, par contre, doit être parfait. Qu'il soit bon ou mauvais, chacun s'octroie le droit de le critiquer même si personne n'est capable de faire ce qu'il fait : artiste, comédien, gestionnaire, personnage public, bon pédagogue, ponctuel, disponible, de commerce agréable, organisateur, poli, avec une bonne éducation, sans tomber dans la routine... Ses qualités humaines doivent être nombreuses, mais ce n'est tout de même qu'un être humain, face à une clientèle éclectique et souvent capricieuse. Pour assouvir cette passion d'enseigner, certains négligent l'aspect financier, la vie familiale, les temps de pause et de repas. L'enseignant se donne entierement. En récompense, l'enseignant est "exposé", "en pature", critiqué pour diverses choses : technique, style, morale, vie privée, moindre petite circonstance sur son caractère ... Et finalement, tout le monde y perd !

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Qui enseignera encore vraiment l'Equitation avec un grand E dans ces conditions ?


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Bibliographie :